L'intérêt de jouer les petits connecteurs...
Auteur : Kevin

Contributeur(s) : sebreym


       En regardant mon émission de poker préférée (High Stakes Poker) l'envie m'est venue de faire un petit article sur les petits connecteurs assortis... Ceux qui regardent régulièrement le poker à la TV reconnaitront surement le jeu de Daniel Negreanu sur ces petites cartes...



Tout d'abord quelques considérations...



Qu'appelle-t-on ici les "petits connecteurs assortis" ? Il s'agit en fait de deux cartes qui se suivent, qui sont de la même couleur et qui sont (arbitrairement) inférieures à 6 ou 7...
Ex : :6h: :5h: ou encore :4s: :3s: etc...

Quelles stats? Calculé avec PokerStove :
suited connectors inférieurs à 7 vs n'importe quels main sauf celles-ci : 41%
suited connectors inférieurs à 7 vs n'importe quels main avec des têtes (sauf paires) : 39%
suited connectors inférieurs à 7 vs n'importe quelle paire : 26%
suited connectors inférieurs à 7 vs AA : 21%

Leur but...



Ici, pas question d'aller chercher une paire ! Le but avec ce type de main est la couleur ou la suite.
Donc attention, premier point de danger : ne pas se laisser embarquer avec une simple paire. N'envoyer avec une double que si on a un bon read ou qu'on est sûr de contrôler le coup. De même, attention aux tableaux à tirages si ce n'est pas le votre ou s'il donne surtout accès à une quinte supérieure à la votre. (ex: :3h: :4h: en main, et tableau :6s: :7c: :Ah: :5s: :8d: où on voit qu'avec un simple 9 (carte représentant un relativement bon kicker pour un tête à tête) on fait la quinte supérieure.

La façon de les jouer...



La façon serrée
Jouer les suited connectors qu'en fin de parole, en limp ou en call sur une relance inférieure à 2,5x la BB, de façon à aller voir le flop et pouvoir les jeter sans regret si on a rien touché.
C'est en effet la première façon de se familiariser avec cette main, de voir les opportunités qui s'offrent sans pour autant les jouer... On peut voir ça comme une première approche, mais je pense pas qu'il faille se limiter à ça vu le potentiel d'une telle main.

La façon Small Ball (qui mériterait un article à elle toute seule)
On les joue en fin de parole (les 3 dernières places selon moi), seulement si aucune relance, et on relance 2,5x la BB, et flop qu'on ne touche ou pas on mise la moitié du pot, si on est callé on fait profil bas pour le reste de la main (sauf si on a touché gros).
Le but ici est de profiter des stats d'une telle main pour aller voir le pot à prix réduit tout en prenant le contrôle de la main en cours en étant le premier relanceur. Au flop on mise pour deux raisons, personne n'a misé ce qui signifie probablement qu'ils ont rien touché (intérêt de la position, cf article d'olivgoal), et en plus on a déjà relancé pre-flop donc c'est un continuation bet tout à fait logique. La plupart du temps tout le monde se couche et on encaisse un petit pot, si ce n'est pas le cas on jette ce n'est que partie remise.

La Negreanu style
Ici on va prendre l'ascendant sur la table en relançant comme avec une grosse main, ou on va caller une relance de ce type (4x la BB max). On voit le flop, et on hésite pas à jeter s'il n'y a rien pour nous.
- Si l'on aperçoit quelque chose pour nous et rien pour l'adversaire (pas de tête), on peut se permettre de checker car l'adversaire nous met aussi sur une grosse main, donc généralement ça nous offre le tirage.
- S'il y a quelque chose pour nous, mais aussi une tête pour l'adversaire on peut tenter plusieurs approches qui dépendent de la position... Premier de parole : check en espérant un slow play ou qu'il a miss le flop lui aussi. Ou alors mise 1/2 pot pour pouvoir se barrer si la relance est trop grosse ou l'inciter à juste payer.
En fait le but ici est double : il fait croire à votre adversaire que vous êtes plutôt sur des têtes et ne vous voit pas venir, et si vous touchez votre tableau et que lui a sa top paire/top kicker voire double paire vous allez maximiser vos gains. Donc le but c'est d'aller chercher l'accident. Et ça marche pas mal...



Nuances



Pour quelles bourses ?
La première va être sur la taille du stack nécessaire à un tel jeu. Pour le jeu serré, pas de problème pour tous les tapis sauf les short stack. Pour les deux derniers, ce sont des stratégies de cash game, ce qui fait qu'il faut plutôt être deepstack pour les mettre en œuvre efficacement, donc en tournoi ne les jouez pas à moins de 20M je pense.

Extension
Par extension, on peut également jouer des mains "moins connectées" mais tout aussi assorties. Par exemple celles séparées d'une seule carte ou de deux : :7h: :5h: ou :7s: :4s: . Mais plus on descend, plus il faut être vigilant et savoir jeter sa main.

Le danger...
Je préfère revenir une fois de plus sur cet aspect. En effet, il est parfois trop tentant de se laisser séduire par une double paire floppée ou un brelan etc... mais il ne faut pas oublier que ce n'est pas ce qu'on est venu chercher ! Il ne faut donc pas s'embarquer trop rapidement dans ce genre de situation à risque.
Pour preuve, voici une confrontation entre Dwan et Peter Eastgate (Champion du Main Event WSOP 2008 ) lors du tout premier épisode de la saison 5 de High Stakes Poker.



Ici, Dwan s'est emballé en touchant son brelan, il suffit de voir la taille du pot pour comprendre à quel point il était à fond dedans. Il était persuadé de gagner... mais c'était sans compter le kicker beaucoup trop faible. Ainsi, on voit bien qu'on ne peut pas se fier à des paires/brelans touchées avec ces mains, et qu'il faut faire très attention à ne pas laisser s'embarquer... ça arrive même aux pros !


       Donc, espérant avoir été clair, je dirais pour conclure que ce sont des mains à fort potentiel, avec des stratégies adaptées à toutes les bourses, et qui augmentent la profondeur du jeu (on va voir des flops pour autre chose que des têtes !). Cependant, il ne faut jamais oublier ce que l'on va chercher avec ce type de mains, c'est à dire un tirage et une quinte ou une couleur... Qui sait, avec un peu de chance vous l'aurez cette quinte flush!